Il est facile d’oublier que chaque site, chaque application et chaque clic ont un impact sur le monde réel. De la consommation d’énergie exponentielle aux inégalités sociales qu’elle a créée, la révolution numérique n’a pas fait que du bien sur notre planète et dans notre société. Mais la bonne nouvelle, c’est que nous, les « makers » et les entreprises du numérique, détenons le pouvoir de transformer cette réalité grâce à la conception responsable de produits digitaux, autrement appelée le produit responsable, qui apportent plus d’avantages qu’on ne le pense, grâce à des bonnes pratiques que nous allons illustrer avec des exemples concrets d’entreprises qui ont ouvert la voie vers un futur meilleur.
Il n’y a pas vraiment de mauvaises façons de faire du produit responsable, tant chaque pierre apportée à l’édifice a le mérite de faire avancer les choses dans le bon sens, et chaque erreur est l’occasion d’apprendre et de faire mieux. Alors la première étape est d’arrêter de culpabiliser et de se mettre dans une posture d’action qui créera une dynamique, et qui fera que vous considérerez cette problématique en amont des projets. Ensuite il y a 3 possibilités qui s’offrent à vous selon le pouvoir que vous avez : soit vous changez votre business model et vous travaillez sur un produit à impact, soit vous réduisez les impacts de votre produit, soit vous vous engagez et vous sensibilisez vos collaborateurs et vos partenaires.
Le changement de modèle d’entreprise n’est souvent envisageable que si vous avez un haut poste décisionnaire. Il est compliqué à mettre en place car il génère beaucoup de risque, mais il peut avoir le plus d’impact. En vous concentrant sur un produit à impact, vous pouvez créer un produit qui non seulement répond aux besoins de vos clients, mais qui a également un impact positif sur la planète et la société.
S’il n’est pas possible de changer de modèle d’entreprise, l’étape suivante consiste à réduire l’impact même de votre produit. Plus facile à dire qu’à faire, il appartient aux concepteurs (souvent des PM/PO, des développeurs et des designers) de connaître les bonnes pratiques à mettre en place. Cela peut impliquer diverses stratégies que nous allons détailler plus loin, comme l’optimisation de la consommation de données de votre produit ou la suppression de dark patterns, ces mécanismes pernicieux pour l’utilisateur que nous avons déjà évoqué dans un précèdent article. Chaque acteur du projet est expert dans son domaine et il vous convient de les aider à se former et de leur faire confiance pour faire des produits plus responsables.
Ce qui nous mène à la dernière étape pour faire du produit responsable quel que soit son niveau de maturité et d’implication sur le produit. Pour cela il convient de s’engager et de sensibiliser ses collaborateurs, sa hiérarchie et ses partenaires, en faisant de la responsabilité une valeur fondamentale et en l’intégrant à vos démarches, soit à travers des objectifs (OKR, KPI, vision…), des formations, ou tout simplement de la promotion à l’intérieur et à l’extérieur de l’entreprise. Pour vous aider à mener ces changements et à sensibiliser vos collaborateurs à cette approche, nos experts Synvance du produit responsable animent des Masterclass et des ateliers spécialement conçus pour vous aider à construire des objectifs responsables et à les mettre en œuvre avec succès.
En tant que concepteurs responsables cherchant à restreindre l’impact de nos produits numériques, il faut s’interroger dès le départ sur l’utilité de notre produit et de ses fonctionnalités. Il faut aussi s’assurer d’une rétrocompatibilité maximale pour qu’il fonctionne sur le plus de terminaux possibles, le plus longtemps possible, tout en essayant de minimiser la consommation d’énergie de toutes les infrastructures en lien avec notre produit. Il est également nécessaire d’éduquer l’utilisateur à travers notre produit quand nous le pouvons. Ces efforts nous permettrons à terme d’être responsable « par défaut ».
Ensuite, pour chaque métier ses bonnes pratiques ! Pour ceux de gestion et de management du produit, il faut ne donner la priorité qu’aux fonctionnalités nécessaires qui correspondent aux besoins réels identifiés lors de la Discovery (phase de découverte impliquant les parties prenantes par le biais d’approches telles que le Design Thinking), quitte à supprimer celles non-essentielles pour simplifier le produit et réduire son impact, tout en répondant aux enjeux métiers. Il est également important de n’inclure que les contenus pertinents, en évitant les médias lourds et en supprimant les contenus riches comme les carrousels ou les cartes interactives, et il ne faut pas hésiter à ajouter de la friction pour éviter des fonctions telles que le scroll infini. En outre, le suivi des données doit être limité aux données importantes pour réduire le nombre d’évènements et minimiser les interactions avec des services tiers, et doit éviter la collecte et le stockage de données personnelles non essentielles, afin de donner la priorité à la vie privée de l’utilisateur et à la protection des données.
En tant que designers, il va être essentiel de privilégier la simplicité et l’intuitivité de l’expérience utilisateur (UX) en minimisant les interactions, en évitant par exemple les carrousels (à bannir !), les animations et les transitions inutiles, qui en plus de vous faire passer pour un mauvais élève en termes d’accessibilité, ont un fort impact sur les ressources informatiques nécessaires au produit. Le designer doit s’assurer de respecter le RGAA (Référentiel général de l’amélioration de l’accessibilité) en adaptant par exemple l’interlignage et la taille du texte pour une meilleure expérience de lecture, ou en préférant les photos aux illustrations pour plus d’universalité. D’un point de vue éco-conception, il peut aussi privilégier un style sobre, et faire un usage limité des typographies spécifiques dites « custom » et de plutôt privilégier les polices systèmes.
Les développeurs quant à eux doivent fournir un code de la meilleure qualité possible, en n’hésitant pas à faire du pair programming, en choisissant les langages de programmation et les Framework appropriés, et en optant pour du CSS lorsque c’est possible afin d’éviter l’utilisation excessive de JavaScript, comme nous le précise Romain Rouvoy, professeur-chercheur en sciences informatiques à l’Université de Lille :
« Une solution pour les rendre moins énergivores pourrait être de recommander, pour telle ou telle application, un type de langage de programmation plus qu’un autre, sachant que pour une même fonctionnalité, la consommation peut varier d’un facteur 100, selon le langage informatique choisi (Java, Python, JavaScript, etc.). On pourrait aussi optimiser les nombreuses requêtes échangées entre les serveurs distants et le smartphone » (CNRS).
Les développeurs doivent aussi privilégier la vitesse d’affichage en minimisant le nombre de requêtes, en chargeant le contenu progressivement et en suivant par exemple les préconisations Web Vitals de Google, qui aident à améliorer le référencement d’un site plus léger. La conception responsable intervient aussi lors des cérémonies agiles comme la Code Review et la recette, où des critères de responsabilité et d’accessibilité doivent être mis en place, et où il est nécessaire de demander le retour de ses pairs.
En plus de ces grandes lignes directrices à suivre, de nombreux guides et référentiels sont mis en place par des instances telles que l’ADEME, l’AFNOR, le collectif Designers Éthiques et la DiNum, pour permettre d’avoir les bons outils pour aller plus loin dans une démarche de conception responsable, et toutes ces ressources sont maitrisées par nos experts Synvance.
De nombreuses entreprises de différents secteurs ont commencé à adopter une conception responsable de leurs produits digitaux afin de minimiser leur impact sur l’environnement et l’humain. Ce sont des cas d’usages parfaits de ce qu’il faut faire et de ce qu’il ne faut pas faire. Un exemple notable est celui de Dalkia, une filiale d’EDF, qui a mis en œuvre des principes de conception responsables sur son site web. En réduisant la taille et le poids des médias, en diminuant le nombre de pages sur le site et en désactivant la lecture automatique des vidéos, Dalkia a obtenu une réduction significative de 64 % des émissions de CO2 et a amélioré l’accessibilité de 94 % selon les normes RGAA de niveau 4. Autre exemple marquant, Organics Basics, une entreprise spécialisée dans l’habillement, a un temps développé une version à faible impact de son site web qui optimise la consommation d’énergie en ne chargeant les images qu’à la demande de l’utilisateur, en minimisant la consommation des terminaux et des infrastructures, et en ne chargeant que les scripts de programmation, les Framework et les cookies essentiels. Cette version du site devient même temporairement inaccessible lors des pics de demande d’énergie. Même si cela par d’un bon sentiment, il est important de ne pas considérer l’accessibilité et l’écoresponsabilité comme des options à activer ou désactiver sur un site, mais plutôt comme des principes intégrés de base. Dans le cas présent, la double charge des pages intensifie le problème, et l’ajout d’une action supplémentaire pour les personnes ayant besoin d’accessibilité dans le cas de Dalkia, semble contre-productif car il change juste la couleur de police d’orange à noir. Pourquoi ne pas le faire par défaut ?
Autre exemple, l’équipe du site web du journal Le Monde a également pris des mesures pour minimiser son empreinte carbone grâce à la conception responsable. En supprimant le code redondant, en optimisant les fonctionnalités les plus émettrices en CO2, en réduisant le nombre de navigateurs pris en charge, en utilisant des polices variables et en supprimant les styles CSS inutilisés, elle a réussi à réduire de 21 % l’empreinte carbone de son site web. Malheureusement, ils ont accompli ces avancées sans aucune communication externe. Cette réserve peut être attribuée à la crainte du greenwashing, ce qui est regrettable car une telle initiative pourrait servir d’inspiration à d’autres médias et renforcer la prise de conscience collective.
Enfin, Backmarket, une entreprise connue pour son business model vertueux et ses engagements environnementaux pour une tech plus propre, s’est fixé pour objectif de réduire l’impact environnemental de son site web, qui représente 7 % des émissions de l’entreprise. Mais des pratiques controversées entachent cette démarche vertueuse, puisque Backmarket fait face à une plainte d’UFC Que Choisir pour motif d’utilisation de dark patterns sur son site e-commerce. Les reproches portent sur les méthodes trompeuses telles que les “Ajouts aux paniers et coûts cachés”, où Backmarket révèle les “frais de services” non divulgués juste avant la finalisation de l’achat, ainsi que la “comparaison et tromperie visuelle”, accusant la licorne française de présenter les prix comme des promotions en affichant un prix barré, un prix réduit et le pourcentage de réduction.
En tant que consultants, nous avons observé une tendance croissante chez nos clients à vouloir mettre en œuvre des approches responsables pour le développement de produits numériques. Nous sommes là pour répondre à cette demande croissante et vous accompagner dans votre transition vers une conception de produits numériques respectueux de l’environnement, socialement responsables et économiquement durables, d’un point de vue systémique et sans tomber dans les travers du greenwashing.
Chaque clic en ligne a un impact, mais nous, les créateurs numériques, avons le pouvoir de le rendre positif. Pour cela, chaque membre d’une équipe produit doit avoir le soutien et les ressources nécessaires pour mettre en place une démarche responsable. Chez Synvance, nous sommes prêts à vous aider dans cette transformation vers un avenir numérique meilleur.
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